Manuscrit autographe complet d'un texte capital S.l., 1916. 1 vol. (230 x 275 mm) de 226 f. dont 210 ch., 16 n. ch (chapitres + table des matières) et 2 f. bl. Chagrin marron, dos à nerfs orné, fleuron au centre des caissons, filets dorés sur les plats, roulette intérieure, tranches dorées. Manuscrit autographe complet. Il comporte d'abondantes corrections, avec plusieurs passages inédits. Signé et daté du « 4 mai 1916 » par son auteur, c'est une pièce unique directement liée à la parution du roman en feuilleton dans la Revue des Deux Mondes (à partir d’août 1916), puis en volume (octobre 1916). Deux mois plus tard, il sera couronné par le prix Goncourt 1914, exceptionnellement attribué en décembre 1916, face au Sous Verdun de Maurice Genevoix.
Reference : 31931
Né le 4 août 1888 à Nyons (Drôme), élève de l'École alsacienne puis du lycée Louis-le-Grand, admis à l'École normale supérieure deux ans avant que Maurice Genevoix n'y soit reçu, Adrien Bertrand se lance très tôt dans le journalisme (Gil Blas, Le Siècle, L'Homme libre de Clemenceau, etc.). Antimilitariste de tempérament mais sans faiblesse au moment d'agir, il rejoint en août 1914 le 2ᵉ régiment de dragons. Le 7 septembre, une audacieuse reconnaissance « vers Clairefontaine et Héméril » lui vaut citation et promotion au feu : « Le Général est heureux de signaler à la Division la très audacieuse et très fructueuse reconnaissance exécutée le 7 septembre [...] sous les ordres du Maréchal des logis Bertrand (Adrien) du 2ᵉ régiment de dragons. [...] Le Maréchal des logis Bertrand est nommé sous-lieutenant » (Croix de guerre, étoile d'argent). Roland Dorgelès fixera, dans l'Anthologie des écrivains morts à la guerre, la légende : reconnaissances téméraires, un groupe d'Allemands surpris, six ennemis tués dont un capitaine, et ces trophées rapportés - casque et sabre « à la poignée enrichie de pierreries ». Aux derniers jours d'octobre 1914, près d'Hénaménil (Lorraine), un éclat d'obus le frappe à la poitrine ; la blessure s'infecte, une tuberculose pulmonaire s'installe. De sanatorium en hôpital, il écrit couché, au crayon, « se sachant perdu » mais décidé à laisser une oeuvre : La Victoire de Lorraine, des vers, des contes, puis L'Appel du sol. Roman d'une guerre de mouvement saisi au ras du sol, le récit suit Vaissette, sergent promu officier, jusqu'à sa mort sur la ligne, au sein d'un groupe de chasseurs alpins luttant en Lorraine et dans la Marne contre la percée allemande. Chaque épisode y est marqué par la mort et l'esprit de sacrifice, sans emphase ni rhétorique de l'arrière. L'ouvrage, dédié à son frère Georges Bertrand (Saint-Cyr 1911, promotion Moskowa ; plusieurs fois blessé, oeil gauche perdu ; cinq citations ; carrière poursuivie comme instructeur puis attaché militaire à Washington, finissant colonel), paraît en feuilleton dans la Revue des Deux Mondes dès août 1916, puis en volume en novembre. La double délibération de décembre permet de le consacrer du prix Goncourt 1914, lequel n'avait pas été décerné. Rappelons le contexte : la guerre déroute l'Académie Goncourt qui, réunie pour la première fois au restaurant Drouant le 31 octobre 1914 (on déjeunait jusque-là au Café de Paris, avenue de l'Opéra), publie le 19 décembre 1914 le communiqué suivant : « L'Académie Goncourt ne pouvant, sans infraction à ses statuts, affecter à une oeuvre de secours, nationale ou particulière aux Lettres, le montant de son prix annuel a décidé de ne point le décerner en 1914. Elle a considéré d'autre part l'injustice qu'il y aurait à ne se prononcer que sur les ouvrages publiés jusqu'au mois d'août, beaucoup de volumes annoncés et prêts à paraître étant restés chez l'imprimeur, par suite de la mobilisation des auteurs et des éditeurs. Mais ce qui est différé n'est pas perdu et le prix Goncourt réservé ne se confondra pas avec celui de l'année prochaine. Il en sera donné deux en 1915. » En réalité, un seul prix sera décerné en 1915 (à René Benjamin pour Gaspard), et le rattrapage n'interviendra donc qu'en décembre 1916 : Henri Barbusse obtient le Goncourt de l'année pour Le Feu (huit voix contre deux) et Adrien Bertrand reçoit le Goncourt réservé de 1914 pour L'Appel du sol (neuf voix contre une), Octave Mirbeau apportant sa voix au Sous Verdun de Maurice Genevoix : « le favori d'avril s'était fait doubler par une étoile filante et un mourant », résumera Jean-Yves Le Naour. Jean Norton Cru, dans Témoins, salue les dons littéraires remarquables d'Adrien Bertrand, et range le livre « parmi les meilleures oeuvres » du genre et compte la mort à vingt-neuf ans d'Adrien Bertrand parmi « les pertes les plus cruelles que la littérature ait subies du fait de la guerre » ; André Billy louera ce « très noble et très fier ouvrage » dont les pages descriptives sont « parmi les plus poignantes que les combattants aient produites ». Malgré l'ombre portée du Feu et la montée rapide de la renommée de Genevoix, L'Appel du sol garde une place capitale dans la littérature de 14-18, que la critique redécouvre périodiquement. La vie foudroyée d'Adrien Bertrand ajoute à l'aura de ce manuscrit. Réformé en mars 1917, il meurt à Grasse le 18 novembre 1917. Sa veuve, Suzanne Périn, a magnifiquement prolongé sa mémoire en dotant l'Académie Goncourt d'un capital destiné à récompenser des poètes pour l'ensemble de leur oeuvre : la Bourse Goncourt | Adrien Bertrand. Le Goncourt de la poésie, créée en 1985, a ainsi distingué des auteurs comme Yves Bonnefoy, Andrée Chedid, Philippe Jaccottet et Christian Bobin. Un seul auteur à l'honneur d'avoir été primé des deux Goncourt - roman et poésie : Jacques Chessex (1973 et 2004). Pièce-pivot pour une collection Goncourt ou un ensemble consacré aux écrivains combattants, ce manuscrit résume et justifie les circonstances hors norme du prix Goncourt 1914, d'abord réservé puis attribué deux ans plus tard : la volonté d'écrire contre la mort, la volonté d'honorer les combattants, et la naissance d'un livre que Dorgelès tenait pour un « magnifique témoignage de soldat ». Une tache d'encre noire touche la partie haute du second plat ainsi que la tranche supérieure, sans atteinte au texte. Jean Norton Cru, Témoins, p. 88-90 et 578-580 ; Anthologie des écrivains morts à la guerre, I, 72 ; Talvart, I, 419 ; Feuilleton de la Revue des Deux Mondes (août 1916) ; Jean-Yves Le Naour, La Gloire et l'Oubli. Maurice Genevoix et Henri Barbusse, Michalon, 2020.
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Goncourt 1914 : le tête sur hollande Paris, Calmann-Lévy, (octobre) 1916. 1 vol. (165 x 190 mm) de 302 p., [1] et 2 f. Broché, à toutes marges, sous étui. Édition originale. Un des 10 premiers exemplaires sur vergé de hollande (n° 9).
Les circonstances du second semestre de l'année 1914 avaient rendu l'attribution du prix Goncourt sinon impossible, du moins compliquée. Le 31 octobre depuis le restaurant Drouant et ce pour la première fois (on déjeunait jusque-là au Café de Paris, avenue de l'Opéra), les Dix s'interrogent puis, le 19 décembre, après avoir réélu son bureau, l'Académie se rallie à la proposition d'Hennique et publie le communiqué suivant : « L'Académie Goncourt ne pouvant, sans infraction à ses statuts, affecter à une oeuvre de secours, nationale ou particulière aux Lettres, le montant de son prix annuel a décidé de ne point le décerner en 1914. Elle a considéré d'autre part l'injustice qu'il y aurait à ne se prononcer que sur les ouvrages publiés jusqu'au mois d'août, beaucoup de volumes annoncés et prêts à paraître étant restés chez l'imprimeur, par suite de la mobilisation des auteurs et des éditeurs. Mais ce qui est différé n'est pas perdu et le prix Goncourt réservé ne se confondra pas avec celui de l'année prochaine. Il en sera donné deux en 1915. » En fin de compte, il sera décidé de ne décerner qu'un prix en 1915, au roman de René Benjamin, Gaspard ; quant aux deux prix que l'Académie annonçait vouloir attribuer, ils seront remis à l'année 1916 : Henri Barbusse, pour Le Feu et Adrien Bertrand pour L'Appel du sol, ce dernier ayant été mis en concurrence avec le Sous Verdun de Maurice Genevoix. Du livre Bertrand, Norton Cru dans Témoins saluera l'image forte, violente mais aussi profondément humaniste qu'il donne au conflit : « Adrien Bertrand avait des dons littéraires remarquables (...). Sa mort à vingt-huit ans est une des pertes les plus cruelles que la littérature ait subies du fait de la guerre (...). Sa valeur contribuera à faire placer le roman parmi les meilleures oeuvres de ce genre et dont les auteurs n'ont pas été combattants (...) ». Adrien Bertrand rédigea son roman sur son lit d'hôpital, après avoir contracté une tuberculose pulmonaire dont il ne se remettra jamais. Le roman paraît en feuilleton dans la Revue des Deux Mondes à partir du mois d'août 1916, puis en volume en novembre ; en décembre, la double délibération des jurés Goncourt ne donna pas lieu à un grand suspense : « En deux scrutins, la décision est validée, avec des majorités claires et nettes : le prix Goncourt 1916 est attribué à Barbusse avec huit voix contre deux et celui de 1914 à Adrien Bertrand par neuf voix contre une, celle d'Octave Mirbeau qui offre son suffrage à Genevoix. Comme il fallait bien justifier son vote, il fut hypocritement reproché au normalien d'avoir choisi un titre [Sous Verdun] qui donnait l'impression qu'il allait parler de la grande bataille de 1916, alors que son ouvrage relatait les affrontements survenus en Meuse d'août à octobre 1914. Le favori d'avril s'était fait doubler par une étoile filante et un mourant. » (Jean-Yves Le Naour, La Gloire et l'Oubli. Maurice Genevoix et Henri Barbusse, témoins de la Grande Guerre, Michalon, « Histoire », 2020.) Adrien Bertrand, toujours malade, réformé en mars 1917 décédera à Grasse quelques mois plus tard (novembre). Roland Dorgelès, qui a rédigé la notice qui lui est consacrée dans l'Anthologie des écrivains morts à la guerre, en dressera ce portrait : « Nous nous étions connus en 1913 à L'Homme libre de Clemenceau et ce qui, dès l'abord, me frappa, ce fut ce terrible regard, droit, flamboyant, cet insoutenable regard qui n'appartient, croit-on, qu'aux héros de roman. On sentait vraiment, dans ces yeux-là, brûler une âme : elle brûla vite... Il aimait fougueusement les idées, les choses, la vie ; son activité s'emparait de tout avec une sorte de fièvre. [...] Indifférent à personne, aimé par tous ceux qui l'approchaient, c'était vraiment le plus loyal des amis, le plus beau des esprits. » Dorgelès, pour illustrer le propos, choisit de partager un extrait du texte : le chapitre IV de L'Appel du sol, « Sur les tombes du cimetière ». Jean Norton Cru, Témoins, p. 88-90 et 578-580 ; Anthologie des écrivains morts à la guerre, I, 72 ; Talvart, I, 419.
1916 (Prix Goncourt 1916)., Curandera, 1986, in 8, broché, 215 pages, absolument neuf
Ray AB1*
Paris Calmann-Lévy 1925 1 vol. relié in-12, demi-chagrin havane, dos à nerfs orné de fleurons dorés, pièce de titre noire, couvertures conservées, 302 pp. Mention de 36e édition. Prix Goncourt 1914 (décerné en 1916). Bon exemplaire, agréablement relié au milieu du XXe siècle.
Les éditions de l'imprimerie nationale de monaco. 1950. In-8. Broché. Bon état, Couv. convenable, Dos satisfaisant, Intérieur frais. 224 pages. Avec papier de protection.. . . . Classification Dewey : 94.4-Editions numérotées
Exemplaire N°1811/2900, sur velin crèvecoeur créme filigrané du marais. Classification Dewey : 94.4-Editions numérotées