Belle lettre à lessayiste et historien Emmanuel Berl, qui lui avait dédié son premier livre Mort de la pensée bourgeoise en 1929.Malraux se sent malade et ...bien délabré. Il ne me semble pas que lunivers soit parti à nous laisser finir nos petits ouvrages (car dans ce lit, jarrange tout de même lédition en un seul volume de la Psycho mis en ordre, ce qui nest pas un petit travail) [il sagit de La Psychologie de lArt, publiés de 1947 à 49 chez Skira], mais en définitive on ne sait jamais. Quant à « se dépêcher », cest une plaisanterie. Ça consiste surtout à être obligé de se dépêcher de recommencer... Il lui annonce lenvoi de La Monnaie de lAbsolu et Saturne, essai sur Goya, et remarque, ...A propos de votre théorie de lamitié politique : la camaraderie de combat, oui ; mais politique, je ne sais pas. Il y a aussi la camaraderie, laccord constructif de ceux qui précisément refusent tout parti, quand cest pour des raisons qui en sont. Je crois plutôt que votre tempérament saccorde mieux à laction chaleureuse dun groupe quà une communauté passive de points de vue... Journaliste et essayiste, Emmanuel Berl est issu dune famille dindustriels et duniversitaires juifs. Dabord proche des Surréalistes, en particulier dAragon, très lié à Drieu La Rochelle (qui se suicide à la Libération), Berl a fait la Grande guerre et connut ce que Zweig appelait « le monde dhier » : dans les années 20, il fréquente Proust qui se fâche avec lui (lanecdote de cette brouille est racontée dans son roman autobiographique « Sylvia »). En 1928 il fait la connaissance de Malraux et lui dédie Mort de la pensée bourgeoise (Grasset, 1929), un pamphlet dans lequel il dénonce latonie de la pensée intellectuelle et politique de ses contemporains, excepté le Malraux des « Conquérants » dont il fait léloge. En 1932, il lance lhebdomadaire Marianne, puis Pavés de Paris quil dirige jusquen 1940. Successivement favorable à Pétain (dont il rédige quelques discours), il rompt avec Vichy et part se réfugier en Corrèze (juillet 41) où il est rejoint par Malraux et son épouse Josette Clotis. Au lendemain de guerre, il abandonne la politique pour se consacrer à la rédaction douvrages autobiographiques. En 1967 lAcadémie française lui décerne le Grand Prix de littérature.Intime de Malraux, lauteur des Conquérants ; de La Condition humaine, de LEspoir lui reprocha souvent son manque de volonté à sengager dans laction politique « votre rapport avec la politique est mauvais parce que vous ne voulez rien »*, lui avait-il dit. Cependant les deux écrivains nouèrent des liens dune amitié pérenne. Berl dans les entretiens quil accorda à Patrick Modiano à la fin de sa vie lui confiait les raisons de la longévité de sa grande amitié avec Malraux, toute intellectualisée : « Je crois quil y a un lien entre sa métaphysique et la mienne, sans cela, on naurait pas pu se supporter aussi longtemps, tant dannées, tant dheures. Il y a une obsession du divin ressenti en tant quabsence, auquel il faut penser toujours sans en parler jamais... » [Interrogatoire, entretiens avec Patrick Modiano, 1976]* [in Tant que vous penserez à moi, en collaboration avec Jean dOrmesson, 1968, p. 60]
Reference : 3858
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