Premier tirage et première émission. Envoi signé sur cette première traduction d'un titre de Ruskin. Paris, Mercure de France, (15 février) 1904. 1 vol. (110 x 180 mm) de 347 p., [2] et 1 f. Demi-maroquin taupe à coins, filets dorés sur les plats, dos à nerfs ornés de caissons d'encadrement, tête dorée, date en pied, couvertures et dos conservés (reliure signée de [Jean] Duval). Édition originale de la traduction française, par Marcel Proust. Exemplaire du premier tirage et de première émission, numéroté à la presse, sans mention (n° 555). Envoi signé : « À Monsieur [nom du dédicataire tronqué], avec ma bien profonde et bien reconnaissante sympathie, son tout dévoué, Marcel Proust ».
Marcel Proust commence à s'intéresser aux ouvrages de Ruskin à l'automne 1899, dès son retour d'Évian-les-Bains, en se plongeant dans la lecture intensive de celui qu'il appelle « ce grand homme » après avoir découvert le chapitre intitulé « La Lampe de la mémoire » des Sept Lampes de l'architecture. Quelques mois plus tard, il apprend dans Le Figaro du 21 janvier 1900 la mort du critique d'art et écrit immédiatement à Marie Nordlinger, une ami anglaise de Manchester, cousine de Reynaldo Hahn, lui exprimant, outre sa tristesse, son désir de pérennité des ouvrages de l'écrivain : il prépare alors plusieurs hommages à Ruskin sous formes d'articles nécrologiques et de notes qui deviendront, avec des modifications amplifiées, les péritextes de sa future traduction de La Bible d'Amiens. Tâche ardue puisque Marcel Proust connaît à peine l'anglais : sa mère fait le « mot à mot », qu'il remanie avec les conseils de Marie Nordlinger et de Robert d'Humières, traducteur de Kipling. Au terme de quatre longues années d'un travail acharné et d'un commentaire personnel sur l'art et la création, Proust achève sa préface, la traduction et les notes, dont certaines se développent sur plusieurs pages. L'ouvrage portera une dédicace à Adrien Proust, au lieu de celle destinée à Reynaldo Hahn : « à la mémoire de MON PÈRE, frappé en travaillant le 24 novembre 1903, mort le 26 novembre, cette traduction est dédiée ». Il s'en excusera dans la dédicace personnelle lorsqu'il offrira un exemplaire à Hahn, « tant [s]on petit Papa désirait le voir paraître que maintenant j'ai mieux aimé vous le retirer pour le lui offrir ». Proust, néanmoins, lui dédicacera le second texte de Ruskin qu'il traduira trois ans plus tard, Les Sésames et les Lys. Seuls deux extraits paraissent en revue, en février et mars 1903, un an avant la parution en volume, dans La Renaissance latine du Prince de Brancovan. À ce dernier, qui se moquait de son piètre niveau d'anglais, Proust répondra : « Je crois que cette traduction, non pas à cause de mon talent qui est nul, mais de ma conscience qui a été infinie - sera une traduction comme il y en a très peu, une véritable reconstitution [...]. À force d'approfondir le sens de chaque mot, la portée de chaque expression, le lien de toutes les idées, je suis arrivé à une connaissance si précise de ce texte que chaque fois que j'ai consulté un Anglais - ou un Français sachant à fond l'anglais - sur une difficulté quelconque, il était généralement une heure avant de voir surgir la difficulté et me félicitait de savoir l'anglais mieux qu'un Anglais. En quoi il se trompait. Je ne sais pas un mot d'anglais parlé et je ne lis pas bien l'anglais. Mais depuis quatre ans que je travaille sur La Bible d'Amiens je la sais entièrement par coeur et elle a pris pour moi ce degré d'assimilation complète, de transparence absolue, où se voient seulement les nébuleuses qui tiennent non à l'insuffisance de notre regard, mais à l'irréductible obscurité de la pensée contemplée ». Il n'a été tiré que sept exemplaires en grand papier. L'exemplaire fut probablement établi par le libraire Ronald Davis dans les années 1920-1930, lorsqu'il fit relier à l'identique tout un ensemble d'oeuvres de Proust (Christie's, Londres, 2007, lot n° 133), dont un Swann et un volume sur hollande de La Bible d'Amiens.
Un des 12 rares grands papiers, imprimés sur hollande. Paris, Mercure de France, (12 mai) 1906. 1 vol. (135 x 190 mm) de 224 p., [1] et 1 f. Demi-maroquin taupe à coins, filets dorés sur les plats, dos à nerfs ornés de caissons d'encadrement, tête dorée, date en pied, couvertures et dos conservés (reliure signée de [Jean] Duval). Édition originale de la traduction française par Marcel Proust. Longue préface inédite de Proust : « Sur la lecture ». Un des 12 premiers exemplaires sur hollande (n° 9).
Marcel Proust commence à s’intéresser aux ouvrages de Ruskin à l’automne 1899 lorsqu’il se plonge dans la lecture de celui qu’il appelle « ce grand homme », après avoir découvert le chapitre intitulé « La lampe de la mémoire » des Sept Lampes de l’architecture. Une révélation. Apprenant quelques mois plus tard la mort du critique d’art, il écrit à Marie Nordlinger, une amie anglaise, cousine de Reynaldo Hahn, pour lui exprimer, outre sa tristesse, son désir de pérennité des ouvrages de l’écrivain : il prépare alors plusieurs hommages à Ruskin sous forme d’articles nécrologiques et de notes qui deviendront, avec des modifications amplifiées, les péritextes de sa future traduction de la Bible d’Amiens. Une tâche ardue puisque Proust connaît à peine l’anglais : c’est madame Proust mère qui fait le ‘mot à mot’, collaborant ainsi d’une manière capitale à la traduction de La Bible d’Amiens. Malade, elle fut remplacée par Marie Nordlinger dans ce rôle de défricheuse lorsque Proust aborda Sésame et les lys, aidée par Robert d’Humières, le traducteur de Kipling au Mercure de France. Après la mort de sa mère, Proust reprit les épreuves et écrivit à Marie Nordlinger : « J’ai clos à jamais l’ère des traductions que Maman favorisait ». Il désirait de son propre aveu se consacrer à son œuvre personnelle et décide, dans cette idée, de faire précéder sa traduction d’une préface ô combien importante, un texte délicieux intitulé « Sur la lecture » : « Il n’y a peut-être pas de jours de notre enfance que nous ayons si pleinement vécus que ceux que nous avons cru laisser sans les vivre, ceux que nous avons passés avec un livre préféré. Je n’ai essayé, dans cette préface, que de réfléchir à mon tour sur le même sujet qu’avait traité Ruskin : l’utilité de la lecture. Ruskin a donné à sa conférence le titre symbolique de Sésame, la parole magique qui ouvre la porte de la caverne des voleurs étant l’allégorie de la lecture qui nous ouvre la porte de ces trésors où est enfermée la plus précieuse sagesse des hommes : les livres ». Remaniées, ces 52 pages prendront ensuite place dans Pastiches et mélanges sous le titre « Journée de lecture ». Précieux exemplaire sur hollande, celui de Jeanne Jacquemin. Peintre autodidacte, elle enflamme la critique à sa première exposition en 1892 et étonne par son physique androgyne et sensuel : la jeune femme rousse « aux yeux préraphaéliques » incarne parfaitement le symbolisme. Membre de la société de la Rose-Croix, elle est admirée par Huysmans, Verlaine, Odilon Redon, et noue avec Stéphane Mallarmé une relation d’amitié et d’admiration réciproque. La « peintresse aux yeux verts », ainsi qu’il la surnomme, est souvent citée dans le Journal d’Edmond de Goncourt ; elle donnera plusieurs lithographies pour L’Estampe moderne et illustrera La Mandragore, un « Conte de Noël » de Jean Lorrain publié en 1894. Dépressive, elle est soignée par le docteur Samuel Pozzi, le père français de la gynécologie, qui connaissait à merveille le Tout-Paris. Amant de Sarah Bernard, surnommé « Docteur Dieu », c’est un ami de la famille Proust ; du père, le Pr. Adrien Proust, épidémiologiste de renom, comme de ses fils Robert (qui fut son élève à l’hôpital Broca) et Marcel (à qui il procura en 1914 la dispense lui évitant d’être envoyé au front). Il encouragea le développement de la radiothérapie, essentiellement à l’hôpital Tenon où le service d’oncologie-radiothérapie porte désormais son nom. Il soigna Jeanne Jacquemin des années durant. L’exemplaire passa ensuite entre les mains du libraire Ronald Davis – c’est probablement lui qui fit établir la reliure, comme il fit exécuter à la fin des années 1920 tout un ensemble des œuvres de Proust (Christie’s, Londres, 2007, lot n° 133), dont un Swann et ce volume sur hollande. Sur ce même papier, on ne connaît par ailleurs que les exemplaires suivants : Léon Blum (conservé à la BnF) ; n° 2 (reliure de Maylander, collections Simonson-Hayoit-Leroy) ; n° 8 (collection R. et B. Loliée). Aucun des 12 ne figurait à l’exposition Proust et son temps de 1971. De la bibliothèque de Jeanne Jacquemin (ex-libris).
Traduction et notes de Marcel Proust, Complexe, Le regard littéraire, 1987, 317 pp., poche, couverture empoussiérée, état correct.
Phone number : 0033 (0)1 42 23 30 39
Editions Denoël 1987 252 pages in-8. 1987. Broché. 252 pages. Illustré de dessins en noir de l'auteur
Bon état
Robert Laffont, Bouquins, 2015, 1024 pp., broché, très légère trace de pli sur la première de couverture, bon état.
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Mercure de France, 1906. In-12 br. " Collection d'auteurs étrangers ". Les deux conférences de John Ruskin, réunies sous le titre Sésame et les Lys, ont été publiées en 1865. La traduction, les notes et la préface : Sur la lecture sont de Proust. Année de l'E.O. Envoi autographe de Marcel Proust au Docteur Émile Gagey. Le Docteur Gagey a loué, à la grande consternation de Proust à cause du bruit, l'entresol de 102 boulevard Haussmann, Proust habitait au premier étage directement au-dessus. Dans une lettre à Mme. Catusse [Fut la plus chère amie de la mère de Proust] d'octobre 1906, Proust a écrit : " ma tante ayant eu l'idée qui n'a pas mon approbation entière de louer l'entresol (ce n'est pas fait mais cela va l'être) du 102, au Docteur Gagey (?), cet homme demande des travaux fous, et il est probable que cela va me forcer à prolonger mon charmant hivernage. De plus (ceci tou à fait entre nous) comme nous n'avons pas le droit de louer à un médecin, je suis convaincu qu le locataire du deuxième que malgré mes prières on n'a pas voulu consulter, va nous faire un procès, etc..." En février 1907 il la écrit " Les travaux du locataire sont presque achevés ".