Lampsaque, , 1799. 2 vol. in-4 manuscrits de (241) et (269) ff., becquets dans le texte et sur un contreplat, demi-basane blonde à petits coins de vélin, dos lisse orné, pièces de titre en maroquin rouge et noir (reliure de l'époque).
Un manuscrit unique et énigmatique : le Dictionnaire érotique de Nicolas Blondeau et ses avatars révolutionnaires.Le manuscrit du Dictionnaire érotique latin-français attribué à Nicolas Blondeau, figure littéraire du XVIIe siècle, représente une oeuvre aussi rare que controversée. Ce texte, conservé jusqu’à nos jours sous une version augmentée par le latiniste François Noël, traverse les siècles avec une histoire marquée par les bouleversements révolutionnaires et les débats littéraires du XIXe siècle.Origine et contexte du manuscrit. Pierre-Nicolas Blondeau, avocat en Parlement et censeur des livres sous l’Ancien Régime, aurait initialement composé un lexique spécifique intitulé Dictionarium vocum obscenarum quæ apud varios authores reperiuntur ex universali meo decerptum. Ce dictionnaire visait à rassembler et expliquer les termes latins jugés licencieux ou obscènes, dans une démarche érudite teintée de pruderie, où il tentait d'« expliquer la signification des mots de la manière la moins déshonnête qu’il serait possible ».Bien que l’oeuvre originale de Blondeau n’ait jamais été publiée et semble aujourd’hui perdue, elle fut mentionnée en 1788 lors de la vente de la bibliothèque du médecin et bibliophile Hyacinthe Théodore Baron. Acquise par les libraires Née de La Rochelle et Maradan, cette copie manuscrite (désignée dans le catalogue comme une « mise au net » autographe) fut destinée à François Noël, érudit et latiniste, qui entreprit d'enrichir et d’annoter l’ouvrage. Noël, connu pour sa production littéraire prolifique, travaillait à la même époque sur une nouvelle édition du Dictionnaire français-latin de Blondeau, publié ultérieurement en 1807.Le rôle de François Noël dans la transformation du texte. Sous la plume de François Noël, le Dictionnaire érotique fut significativement remanié et augmenté. Caché derrière l’anonymat, Noël ajouta une préface au texte dans laquelle il situait l’oeuvre dans son contexte historique, tout en précisant son propre rôle d’éditeur et d’annotateur :« Un homme de lettres de la fin du dernier siècle, Me Pierre Nicolas Blondeau [...] en composant un petit dictionnaire qui a eu la plus grande vogue, avait mis à part les mots licencieux [...] Son intention était d’en faire un petit dictionnaire séparé. [...] L'on a rien changé au style de l’auteur, mais on a ajouté à sa nomenclature beaucoup de mots employés dans un sens obscène par les auteurs latins ».Malgré l’intérêt de son travail, Noël ne parvint pas à publier cet ouvrage de son vivant. À sa mort en 1841, sa bibliothèque fut vendue, à l’exception de certains manuscrits qu’il légua à son fils Charles Noël. Parmi eux figurait le Dictionnaire érotique, resté inédit, comme l’atteste une note autographe sur la garde du manuscrit : « Légué à mon fils Charles Noël. Le 1er juin 1832. Fr. Noël ».La publication par Isidore Liseux et Alcide Bonneau. Ce n’est qu’en 1885 que le Dictionnaire érotique vit enfin le jour sous une forme imprimée, grâce à l’éditeur parisien Isidore Liseux, spécialiste des textes rares, souvent érotiques ou anticléricaux. Liseux, en collaboration avec Alcide Bonneau, publia le texte sous le titre Dictionnaire érotique latin-français, par Nicolas Blondeau. Cette édition, précédée d’un essai sur la langue érotique signé par Bonneau, distinguait le texte original de Blondeau des annotations de Noël, imprimées en bas de page. Cependant, une grande partie des commentaires manuscrits de Noël ne fut pas retenue dans l’édition.Liseux identifia Noël comme l’auteur des annotations grâce à une analyse comparative de son écriture avec celle de nombreux manuscrits laissés par l’érudit, confirmant ainsi son rôle crucial dans l’enrichissement du texte. Il souligna également que Noël, professeur de Belles-Lettres et inspecteur général de l’Université, était l’auteur du Recueil de Priapées publié anonymement à Paris en 1798 sous le titre d’Erotopargnion.Une oeuvre entre érudition et controverse. Le Dictionnaire érotique, à travers ses multiples avatars et transformations, incarne à la fois l’ambition philologique d’explorer les aspects marginaux de la langue latine et les débats moraux entourant la publication de tels textes. L’intervention de François Noël, bien qu’anonyme, enrichit considérablement l’ouvrage, tandis que l’édition de Liseux et Bonneau permit de préserver une oeuvre qui, sans leur intervention, aurait probablement sombré dans l’oubli.Ce manuscrit, témoin d’une tradition érudite fascinante, illustre également les tensions entre l’héritage littéraire du passé et les sensibilités culturelles de chaque époque. À mi-chemin entre l’érudition académique et la subversion littéraire, il reste une source précieuse pour l’étude des pratiques lexicographiques et des discours sur la morale dans l’histoire littéraire européenne.Seule copie manuscrite d'une écriture parfaitement lisible et sans rature établie par François Noël du dictionnaire érotique latin-français de Nicolas Blondeau.Dans le catalogue de l'Exposition internationale du surréalisme (1959-1960), André Breton rédigea une notice consacrée à ce dictionnaire, « un ouvrage publié sous le couvert de l'érudition à la fin du dix-neuvième siècle, et qui n'en prend que plus de charme » (Site Atelier André Breton, 2005).Pia, Enfer, 207 ; Gay, I, 908 ; Paule Adamy, Isidore Liseux 1835-1894 : Un grand « petit éditeur », Plein Chant (Bassac) 2009 ; Catalogue de la bibliothèque de feu M. Baron (1788), n°4495.
érotique par le Traducteur du Manuel d'Érotologie de Forberg.- Paris. Isidore Liseux. 1885. In-8 (140 x 211mm) dos chagrin grenat à 4 nerfs illustré de 3 fleurons dorés, soit un petit diable et 2 têtes de diable, plats marbrés, gardes peignées, LXXXIV, 150, (2) pages. reliure lgt épidermée, très bon état intérieur.